Devant le Juge compétent en matière de Pensions Militaires d’Invalidité, le Ministère des Armées produit de plus en plus souvent un avis de la Commission Consultative Médicale, la plupart du temps pour contester les Conclusions de l’expert qu’il a lui-même mandaté…
Cet avis pose plusieurs difficultés puisqu’il peut faire impression sur le Juge, alors qu’il est établi :
– Par des personnes qui dépendent du Ministère des Armées, qui ne fait ainsi que tenter de se constituer des » preuves » à lui-même,
– Sans que l’on connaisse l’identité et la qualité de ses rédacteurs et donc que l’on puisse vérifier la régularité de leur désignation,
– Sur pièces, sans que le militaire ou l’ancien militaire, demandeur à Pension militaire d’invalidité, ne soit examiné par cette Commission, ou qu’il ait pu lui transmettre des observations ou quelque document médical que ce soit.
Cette situation a déjà été sanctionnée de nullité par le Tribunal des Pensions Militaires de PARIS, notamment par jugement du 19 décembre 2012, qui, prenant connaissance d’un avis de la Commission Consultative Médicale, n’a pas manqué de noter que :
– » La composition de la commission (…) n’est nullement précisée ;
– Le nom et les qualités du Président de cette » commission » ne sont pas indiqués ;
– De plus, l’avis, prétendument rendu par cette commission, ne fut nullement signé de la main du Président (au demeurant inconnu), mais porte un vague paraphe émanant d’un auteur anonyme, censé agir » par autorisation du Président de la Commission « , et ce, alors qu’il n’est pas justifié de la délégation qui aurait été donnée par un président (…),
– L’avis formulé s’avérait frappé d’une nullité absolue « .
L’avis de la Commission Consultative Médicale pose d’autant plus difficulté qu’il est extrêmement difficile d’accéder aux textes qui prévoient sa composition et son fonctionnement, pour vérifier s’ils ont été respectés par le Ministère des Armées et mettre en avant leur nullité.
En effet, les avis rendus par la Commission Consultative Médicale ne mentionnent jamais ces textes et les recherches par mots clés sur internet ne donnent aucun résultat constructif.
Elles permettent au mieux d’accéder à l’article 4 de l’arrêté du 3 décembre 2018 pris pour l’application du Code des Pensions Militaires d’Invalidité et des Victimes de Guerre et aux articles R132-7, R151-12 et R153-3 de ce code qui, soit imposent la saisine de cette commission pour examen des dossiers de demandes de pension, de renouvellement ou de révision de pension, soit la rendent possible chaque fois qu’elle est considérée comme utile.
En réalité, les textes qui gouvernement la composition et le fonctionnement de la Commission Consultative Médicale sont anciens et donc peu accessibles.
Le texte le plus intéressant est une Instruction ministérielle du 22 novembre 1924 qui détaille la composition, le rôle, les attributions et la compétence de la Commission sans toutefois apporter de précisions sur son fonctionnement.
Elle doit incontestablement être opposée au Ministère des Armées puisqu’il en ressort que l’irrégularité de l’avis de la Commission Consultative Médicale peut découler :
– De la composition de la Commission,
– De l’insuffisance de la motivation de son avis,
– Ou encore, notamment, des conditions dans lesquelles la Commission a proposé un abaissement du taux d’invalidité le plus élevé parmi ceux proposés par les experts et la commission de réforme.
Il est assez symptomatique de constater qu’à travers les différentes dispositions qui ont institué puis régi la Commission Consultative Médicale depuis 1916, aucune ne détaille réellement son mode de fonctionnement (nombre minimal de personnes présentes, majorité à atteindre pour décider du sens de l’avis à donner, information de la personne dont le dossier est examiné, délai pour rendre ces avis, etc.).
Il en résulte que le fonctionnement de cette Commission reste flou, destiné sans doute à s’adapter aux souhaits du Ministère des Armées, sans implication du demandeur à pension, et sans compte à rendre sur les modalités selon lesquelles ces avis sont rendus.
L’ancienneté de l’instruction du 22 novembre 1924 ne doit pas faire obstacle à sa mise en œuvre : il appartient au demandeur de s’en saisir pour soulever s’il le souhaite la nullité de l’avis de la Commission Consultative Médicale, mais également pour permettre au Juge de le relativiser s’agissant d’un document non contradictoire, purement interne au Ministère.
Maître Laure MATTLER
AVOCAT
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