La Cour introduit la notion d’illégalité fautive du refus d’octroi d’une pension militaire d’invalidité et indemnise un militaire au titre des pertes de revenus (retraite, congé) occasionnés par ce refus.
Les Faits :
En 2009, le Ministre de la Défense a refusé d’octroyer à Monsieur B… une pension militaire d’invalidité au motif que sa maladie (troubles anxieux et dépressifs) n’était pas imputable au service.
En 2014, cette décision de rejet a été annulée par le Conseil d’Etat, qui a reconnu l’imputabilité de la maladie au service et a accordé une Pension militaire d’invalidité à Monsieur B…
Ce dernier a alors formé une demande préalable d’indemnisation des préjudices résultant pour lui de l’absence de reconnaissance, en 2009, de cette imputabilité au service. Cette demande a été implicitement rejetée par le Ministre de la Défense.
En 2018, saisi par Monsieur B…, le Tribunal Administratif de TOULON a condamné l’Etat à verser à l’intéressé la somme de 158 956€ au titre de l’ensemble de ses préjudices.
Par arrêt du 11 juin 2021, la Cour Administrative d’Appel, saisie par la Ministre des Armées, a réduit cette somme à 67 314,17€, et ce de façon critiquable, de sorte que, sur ce point uniquement le Conseil d’Etat l’a censuré.
Pour le reste, l’arrêt de la Cour Administrative d’Appel de MARSEILLE est définitif et particulièrement intéressant.
L’arrêt n°18MA05442 de la 7ème Chambre de la CAA de MARSEILLE retient la responsabilité de l’Etat pour faute en raison de son refus d’accorder une pension militaire d’invalidité :
La Cour condamne l’Etat à indemniser le militaire, dès lors que son refus de Pension militaire d’invalidité a causé trois types de préjudices à l’intéressé :
- Un préjudice financier au titre des droits à Congé Longue Durée pour Maladie: son Congé n’ayant initialement pas été jugé en lien avec le service, Monsieur B… n’a perçu sa solde entière que pendant 3 ans, avant de percevoir une demi-solde, alors que la Cour considère qu’il aurait dû percevoir une solde complète pendant 5 ans, puis une demi-solde pendant 3 ans.
Rejetant l’argumentation du Ministère des Armées, la Cour rappelle que la pension militaire d’invalidité n’a pas à être déduite de l’indemnisation due au militaire de ce chef.
Surtout, la Cour fait un lien intéressant entre la Pension Militaire d’Invalidité et le Congé Longue Durée pour Maladie : elle estime que, lorsque l’imputabilité d’une affection au service est consacrée par l’attribution d’une pension militaire d’invalidité, cette reconnaissance doit amener l’Etat à considérer que le Congé Longue Durée pour Maladie du militaire est survenu du fait ou l’occasion de l’exercice de ses fonctions.
La Cour tend donc à lier le sort du Congé Longue Durée pour Maladie à celui de la demande de pension militaire d’invalidité du militaire : si l’affection est reconnue imputable au service en matière de pension militaire d’invalidité, elle doit également l’être en matière de Congé Longue Durée pour Maladie.
- Un préjudice financier en termes de droits à la retraite: la Cour retient une faute de l’Etat résultant du fait que le militaire, faute de reconnaissance de l’imputabilité de l’affection au service, a été placé à la retraite d’office plus tôt que prévu, alors qu’il aurait dû bénéficier de 3 ans de Congé Longue Durée pour Maladie supplémentaires et bénéficier d’un calcul plus favorable de ses droits à la retraite.
La Cour rejette l’argument du Ministère lié à la prescription de la demande d’indemnisation, au motif que l’article 55 du Code des Pensions Civiles et Militaires de Retraite ne s’applique pas.
- Un préjudice moral: la Cour accorde au militaire, comme le Tribunal l’a fait avant elle, une indemnisation de 10 000€, dont le montant est suffisamment exceptionnel pour être souligné.
Maître Laure MATTLER
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